La loi visant à assurer une justice patrimoniale au sein de la famille instaure un dispositif de décharge gracieuse de solidarité fiscale entre ex-époux et une nouvelle sanction d’indignité matrimoniale.
Une loi ayant pour objectif de rétablir une certaine équité fiscale entre les membres d’un couple et d’ajouter des cas de révocation des avantages matrimoniaux entre époux a été récemment adoptée. Tour d’horizon des principales mesures introduites.
Les époux, quel que soit leur régime matrimonial, et les partenaires de pacte civil de solidarité (Pacs) forment un foyer fiscal et sont soumis au principe de solidarité fiscale. Ce principe les oblige au paiement solidaire des dettes fiscales communes.
Toutefois, en cas de divorce ou de rupture de Pacs, l’un des ex-conjoints peut adresser à l’administration fiscale une demande de décharge de l’obligation de paiement solidaire. Pour accorder cette décharge, l’administration évalue si certaines conditions sont réunies : rupture de la vie commune, disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale et la situation patrimoniale du demandeur, comportement fiscal…
Devant la complexité de cette procédure, la loi nouvelle prévoit, en parallèle, un dispositif de décharge gracieuse de solidarité. En pratique, il s’agit d’une mesure de bienveillance relevant d’un pouvoir discrétionnaire de l’administration. Cette dernière pouvant accorder cette décharge quand bien même le critère de la disproportion évoqué précédemment n’est pas remplie. À noter que, lorsqu’elle est accordée, la décharge gracieuse de solidarité peut s’appliquer au paiement de toutes les impositions concernées, y compris l’impôt sur la fortune immobilière. Autre précision, les sommes déjà versées à la date de la demande de décharge peuvent être restituées.
Par principe, une donation est irrévocable. En pratique, le donateur ne peut donc plus revenir sur sa décision et récupérer le bien donné. Toutefois, une donation peut être révoquée pour cause d’ingratitude dans trois situations :
– le donataire a attenté à la vie du donateur ;
– le donataire s’est rendu coupable envers le donateur de sévices, délits ou injures graves ;
– le donataire refuse des aliments au donateur.
Ce principe d’ingratitude se retrouve également dans le cadre successoral. Ainsi, est indigne de succéder et est donc exclu de la succession :
– celui qui est condamné, comme auteur ou complice, à une peine criminelle pour avoir volontairement donné ou tenté de donner la mort au défunt ;
– celui qui est condamné, comme auteur ou complice, à une peine criminelle pour avoir volontairement porté des coups ou commis des violences ou voies de fait ayant entraîné la mort du défunt sans intention de la donner.
Toujours dans l’optique d’assurer une justice patrimoniale, la loi nouvelle a introduit une nouvelle sanction : l’indignité matrimoniale. Une sanction qui s’inspire largement de l’indignité successorale et qui a vocation à s’appliquer automatiquement quel que soit le régime matrimonial des époux (régimes communautaires et séparatistes).
Ainsi, « l’époux condamné, comme auteur ou complice, pour avoir volontairement donné ou tenté de donner la mort à son époux ou pour avoir volontairement commis des violences ayant entraîné la mort de son époux sans intention de la donner est, dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial, déchu de plein droit du bénéfice des clauses de la convention matrimoniale qui prennent effet à la dissolution du régime matrimonial ou au décès de l’un des époux et qui lui confèrent un avantage ».
Précision : les avantages matrimoniaux sont les enrichissements qu’un époux retire du régime matrimonial conventionnellement adopté par rapport à la situation qui aurait été la sienne dans le régime légal (régime de la communauté réduite aux acquêts). Un enrichissement qui s’opère au jour de la dissolution du régime. Étant précisé que ces avantages échappent au régime juridique des libéralités : ils ne sont ni rapportables ni réductibles lors de la succession.
Par ailleurs, l’indignité successorale peut être prononcée à titre facultatif. Ce qui signifie que cette déchéance doit être prononcée par le tribunal judiciaire à la demande d’un héritier, de l’époux de la personne condamnée ou du ministère public. Ainsi, dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial, peut être déchu du bénéfice des clauses de la convention matrimoniale qui prennent effet à la dissolution du régime matrimonial ou au décès de l’un des époux et qui lui confèrent un avantage l’époux condamné :
– comme auteur ou complice de tortures, d’actes de barbarie, de violences volontaires, de viol ou d’agression sexuelle envers son époux ;
– pour témoignage mensonger porté contre son époux dans une procédure criminelle ;
– pour s’être volontairement abstenu d’empêcher un crime ou un délit contre l’intégrité corporelle de son époux d’où il est résulté la mort, alors qu’il pouvait le faire sans risque pour lui ou pour les tiers ;
– pour dénonciation calomnieuse contre son époux lorsque, pour les faits dénoncés, une peine criminelle était encourue.
Loi n° 2024-494 du 31 mai 2024, JO du 1er juin 2024
Les Echos Publishing 2024